Je veux être ouvert d'esprit

Image de Mohamed Nohassi

Table des matières

  1. Je n’ai pas envie, mais je veux
  2. L’ouverture d’esprit
  3. Une pensée critique
  4. Changer d’avis

Je n’ai pas envie, mais je veux

Il y a des idées que je n’aime pas. Des idées qui me mettent mal à l’aise, que je n’ai pas envie de considérer.

J’ai des croyances que je n’ai pas envie de remettre en question. J’ai des positions religieuses, éthiques, politiques…, que j’ai toujours considérées comme plutôt bonnes, justes et vraies. Je n’ai pas envie d’éprouver leur solidité d’une façon impartiale, d’écouter sans préjugés les positions « adverses ».

Pourtant c’est ce que je veux faire. Je veux être « ouvert d’esprit ».

L’ouverture d’esprit

Il y a une citation, anonyme, que j’aime bien :

Truth withstands scrutiny.1

Elle porte l’idée que la vérité2 ne disparait pas quand on l’examine. Peu importe l’importance que j’accorde à une croyance ou une opinion, si elle est vraie elle le restera même après l’avoir examinée.

Une autre citation que j’apprécie, généralement attribuée à Aristote, est :

C’est la marque d’un esprit érudit qu’être capable d’examiner une pensée sans l’accepter pour autant.

J’ai grandi dans un milieu plutôt fermé d’esprit. Dans cet endogroupe3, il y a des « véritées » (religieuses, éthiques, politiques…) tenues pour absolument vraies et incontestables, explicitement ou non. Examiner, sans immédiatement la condamner, une pensée contraire à ces dogmes est extrêmement mal perçu.

Le simple fait de mettre en suspend sa croyance sur un de ces dogmes pour l’examiner en étant impartial est désapprouvé et peut provoquer des réactions de méfiance, d’opposition ou de rejet.

Je n’ai pas encore étudié les raisons sous-jacentes à ce phénomène, très répandu par ailleurs.

J’émets l’hypothèse qu’il s’agit d’une combinaison d’une part d’une perception de toute pensée divergente comme une menace à l’intégrité du groupe ; et d’autre part d’une peur d’abandonner une position ou une croyance ardemment défendue.

Par exemple j’ai prévu, dans un article futur, d’examiner avec les plus d’impartialité possible une question qui, je crois, est un dogme au sein de mon endogroupe. Il s’agit des questions d’éthique liées à l’avortement.

J’imagine que l’idée même de pouvoir suspendre son jugement sur la moralité ou l’immoralité de l’avortement peut provoquer une réaction viscérale chez certains membres de mon endogroupe, qui seraient prêts à immédiatement me présenter de vigoureux arguments défendant l’immoralité de cet acte. Par peur que je change d’avis ?

C’est une réticence naturelle, que j’ai également eue au moment où j’ai considéré la possibilité d’étudier cette question.

C’est là que l’ouverture d’esprit entre en jeu. Si la vérité est que cet acte est bien immoral, alors ce sera toujours le cas après mon examen et j’arriverai à cette conclusion. S’il ne l’est pas, alors j’étais dans l’erreur et je changerai de position sur le sujet. Évidemment il peut exister des positions intermédiaires et j’adopterai celle qui est le plus proche de la réalité.

Je veux adopter cette approche autant que possible pour toutes les questions qui se présentent. Je veux avoir la liberté d’examiner toutes les idées du monde sans pression, sans peur, sans préjugés.

Une pensée critique

L’ouverture d’esprit ce n’est pas accepter toutes les idées et toutes les positions. C’est accepter d’examiner toutes les idées et toutes les positions, sans préjuger de la conclusion à laquelle on aboutira. C’est ne pas rejeter une idée du simple fait qu’elle nous déplait ou que ses implications nous déplaisent.

Une ouverture d’esprit ne peut être saine que si elle est complétée d’un esprit critique, pour bien raisonner, discerner et évaluer les arguments et faire le tri dans les idées.

C’est de cette manière que je veux penser et avancer dans la vie, car c’est seulement ainsi que je serai libre de réfléchir par moi-même plutôt que de déléguer ma pensée à d’autres.

Comme le dit l’écrivain Christopher Hitchens :

The essence of the independent mind lies not in what it thinks, but in how it thinks.4

Changer d’avis

Il est parfois difficile de changer d’avis. Je veux pourtant être prêt à le faire autant de fois que nécessaire, dès que les éléments à ma disposition et ma connaissance du réel me poussent à le faire. C’est une question d’honnêteté envers moi-même et envers les autres.

Pour terminer, voici une citation du physicien Neil deGrasse Tyson :

One of the biggest problems with the world today is that we have large groups of people who will accept whatever they hear on the grapevine, just because it suits their worldview—not because it is actually true or because they have evidence to support it. The really striking thing is that it would not take much effort to establish validity in most of these cases… but people prefer reassurance to research.5

  1. La vérité résiste à l’examen minutieux. 

  2. Ce que j’entends exactement par « la vérité » sera approfondi dans un article ultérieur. On peut ici considérer qu’il s’agit de l’expression d’une connaissance la plus conforme possible au réel. 

  3. L’endogroupe est le groupe auquel un individu a tendance à s’identifier (par opposition à l’exogroupe). 

  4. L’essence de l’esprit indépendant ne réside pas dans ce qu’il pense, mais dans la façon dont il pense. 

  5. L’un des plus gros problèmes du monde d’aujourd’hui est qu’il y a de grands groupes de personnes qui acceptent tout ce qu’elles entendent dire, simplement parce que cela se conforme à leur vision du monde — pas parce que c’est réellement vrai ou parce qu’elles ont des preuves à l’appui. Ce qui est vraiment frappant, c’est qu’il ne faudrait pas beaucoup d’efforts pour établir la validité dans la plupart de ces cas… mais les gens préfèrent se rassurer plutôt que de chercher.